Avis Soutenance d'HDR - Clotilde Aubry de Maromont 

"La société obligée. Droit civil et construction de l'État en France"

Jury :

Garant : M. Philippe Briand, Professeur, Université de Nantes
 
Jury :
M. Frédéric Audren, Directeur de recherche, Sciences Po Paris
M. Grégoire Bigot, Professeur, Nantes Université
M. Philippe Briand, Professeur, Nantes Université
Mme Anne-Sophie Chambost, Professeure, Sciences Po Lyon
Mme Véronique Champeil-Desplats, Professeure, Université Paris-Nanterre
M. Rafael Encinas de Munagorri, Professeur, Nantes Université

Résumé du mémoire original :
 
 En dévoilant l'idéologie du concept d'obligation, a priori neutre et dépolitisé, l'ouvrage démontre comment une société obligée a été pensée et construite au service de l'exercice du pouvoir de l'État. Cette société obligée suggère que la discipline des individus est consubstantielle à la docilité politique, autrement dit qu'il n'y a pas d'État sans obligation juridique et donc, que l'État moderne est intrinsèquement un État civiliste. L'étude repose sur une analyse des glissements sémantiques du concept d'obligation sur la longue durée dans les œuvres juridiques, les traités philosophiques et politiques et le langage courant, tout en restituant ces transformations dans l'ère sociale qui les produit. À partir d'une analyse discursive, biographique et bibliographique et en croisant les méthodes de la science juridique et des sciences sociales, l'étude met en exergue les sédimentations progressives qui se sont imprégnées dans le concept d'obligation et qui se sont ajoutées par strates successives au cours de l'histoire. À partir du lien de contrainte inventé à Rome par le vinculum juris, trois autres univers de sens se sont agrégées à l'obligation : l'union, dès lors que la contrainte a dû se légitimer par la reconnaissance de droits et libertés individuelles, la valeur, dès lors que le libéralisme économique est devenu la nouvelle raison d'État et, enfin, le système, dès lors qu'un ordre juridique unitaire et rationnel a dû se constituer pour fonder l'État moderne. Ces formes, qui incarnent les fondements de l'ordre juridique et politique, se sont ajoutées les unes aux autres à des époques où de grands débats d'idées et des reconfigurations politiques majeures agitent la réflexion juridique et sociale. L'étude met au jour comment, par leurs productions savantes et leurs enseignements, les civilistes construisent en continu un discours qui façonne l'ordre juridique, l'ordre social, l'ordre économique et donc l'ordre politique. L'ouvrage permet alors de rappeler que les civilistes sont, consciemment ou non, et qu'ils le veuillent ou non, des faiseurs d'État.